Miroir aux alouettes : est-ce une réalité pour Cap Estérel ?
Résidences de Tourisme : Miroir aux alouettes ? telle était la première partie de l’émission de France 2, Carnet de Voyage d'envoyé Spécial ,à 20H45, le soir du 15 août, émission présentée par Guilaine Chenu et Françoise Joly.
Qu’est ce donc qu’une résidence de Tourisme ? Une résidence de tourisme est un type d'hébergement touristique qui accueille essentiellement des familles, le plus souvent lors de leurs vacances, mais aussi les séjours d’affaires. Elle est présente à la ville, à la campagne, et bien entendu en bord de mer.
Partout, le principe est le même : un investisseur privé achète un appartement avec un double objectif, l'occuper pour quelques semaines de vacances et le louer le reste du temps. Mais en se déchargeant de tout souci de gestion, puisque l'exploitant s'engage à lui verser des loyers pendant les neuf ou dix années de son bail et à gérer réservations, ménage, arrivées et départs. Le modèle imaginé à l'origine par Pierre & Vacances a fait des émules. Et les systèmes de défiscalisation successifs ont permis aux investisseurs d'acheter tout en réduisant leur impôt (TVA ou impôt sur le revenu) et en touchant des loyers prévus à l'avance.
Et ce n’est pas par hasard si la station phare présentée dans l’émission était Cap Estérel. En effet il s’agit de la station de loisirs la plus importante d’Europe, la plus importante du groupe Pierre et Vacances, à l’origine de ce concept, et probablement l’une des mieux situés sur la côte d’azur. Présentée come une solution moins onéreuse que les séjours en Hôtel pour une famille les résidences de loisirs ne sont pas pour autant toujours la panacée pour l’investisseur. Déjà il faut faire le pas de vouloir investir (on a vu dans l’émission un père de famille s’interrogeait et renoncer après réflexions) et d’accepter toutes les attributs liés à ce statut (taxe, gestion de la copropriété, maintenance et rénovation de l’appartement, ..) et surtout ce que l’émission a mis en évidence de manière trop indirecte c’est le lien, le contrat à vie avec l’opérateur. Lorsqu’on appréhende les évolutions sociétales et comportementales de ce début de XXI siècle on mesure les difficultés d’un lien durable de surcroît construit sur une transaction commerciale. Et pourtant rien de positif ne peut se faire durablement dans une résidence de tourisme sans des liens indéfectibles de compréhension entre l’opérateur, ses filiales, les propriétaires, et les commerçants. Pour l’oublier régulièrement Pierre et Vacances, sur le site de Cap Estérel, le paye cash chaque fois. Les propriétaires eux le payent plusieurs fois.
Une résidence demande de l’entretien (on bien vu dans l’émission que même une station phare souffrait d’un manque régulier d’entretien : il est vrai que ces dernières années le syndic affilié au groupe, gestionnaire encore du plus grand nombre de copropriétés sur ce se site ne se distinguait pas par son pragmatisme, son engagement, et sa vision pluriannuelle d’une gestion immobilière). Autre point soulevé dans l’émission sur cette station, pourtant emblématique c’est le ménage et l’accueil des résidants.
M. Pinel, de part ses fonctions, bien éloigné du concret d’une station (on a pu noter ici la dimension hiérarchique d’un groupe tel que Pierre et Vacances pour gérer la communication et regretter que ce ne soit pas le Directeur du site pourtant confronté au quotidien à ces réalités) nous a expliqué les difficultés a recruter du personnel responsable et compétent. La côte d’azur recèle pourtant des lieux prestigieux bien entretenus et il conviendrait probablement d’évoquer d’autres causes possibles mais pris sur les faits la réponse proposée était probablement la bonne réponse. Autre point important une résidence de loisirs proposent des loisirs et la aussi Cap Estérel se distingue. Certes par le nombre et la variétés des loisirs proposés sur le site mais aussi par le peu de transparence affiché par l’opérateur. On a vu par simple addition qu’une semaine coûtait deux fois le prix de l’appartement et encore les taxes notamment de séjour n’étaient pas prises en compte. D’une manière générale ces différents groupes doivent mieux appréhender aujourd’hui la faiblesse de l’illusion et l’importance du respect des clients et d’une relation plus franche.
Ces dernières années, certains investisseurs ont laissé des plumes dans l'aventure des résidences de tourisme et se sont retrouvés devant les tribunaux face à des sociétés défaillantes. Les derniers en date, semble t-il, sont les copropriétaires de résidences exploitées par Resitel et Soderev, des filiales du groupe Lagrange. Ainsi récemment, la FNAPRT, la Fédération nationale des associations de propriétaires de résidences de tourisme, s'est créée pour regrouper plusieurs associations de défense des propriétaires. Quand l'exploitant ne paie plus les loyers, les propriétaires se retrouvent en fâcheuse posture. À l'origine des problèmes, le fait que souvent les loyers qui avaient été garantis aux investisseurs étaient trop élevés. Ce qui a encore été accentué par leur indexation sur l'ICC, l'indice du coût de la construction, qui les a mécaniquement gonflés. Pierre et Vacances, en regard de ces derniers résultats, a bien compris son intérêt de changer rapidement cet indice et comme trop souvent si l’enjeu peut se comprendre pour sauvegarder un essentiel la méthode utilisée est si primaire et si brutale que rien que les dégâts collatéraux sont importants.
Enfin certains propriétaires se sont regroupés pour gérer leur bien comme l’émission a pu le montrer (on est ici loin des paradigmes d’origine du concept) et d’autres ont amené le député UMP du Haut-Rhin, Jean-Luc Reitzer, à poser une question écrite au gouvernement sur le sujet en octobre 2012. Le ministère de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme lui a répondu en février en reconnaissant «des cas d'exploitants qui n'honorent pas leurs engagements et font perdre à l'investisseur le produit de la location et le bénéfice de la délocalisation». Le ministère juge «une amélioration de l'information préalable des investisseurs certainement souhaitable». Et annonce que la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, a prévu de lancer cette année une enquête sur l'investissement immobilier défiscalisé.
Acheter un appartement dans une résidence de tourisme, c'est d'abord faire un investissement immobilier. Il faut donc veiller à la qualité de la construction, à la solidité du promoteur, mais aussi, comme toujours lorsqu'il est question d'immobilier, à l'emplacement, l’emplacement, l’emplacement. C'est lui qui fera sa valeur en cas de revente et son potentiel à la location. Certains promoteurs, comme MGM, refusent d'ailleurs de mettre en avant un taux de rendement, arguant qu'il s'agit d'abord d'un investissement patrimonial et non d'un produit financier.
Et puis il faut être conscient que le taux de rendement n'est assuré que pour la durée du bail et qu'il sera renégocié par l'exploitant au bout de neuf ou dix ans en fonction des conditions du marché.
C'est ce qui est arrivé même chez Pierre & Vacances, où certains investisseurs se sont vu proposer lors du renouvellement de leur bail une rentabilité moindre, nettement moindre. Sachez enfin que, comme pour tout bien immobilier, il faudra aussi compter, d'une façon ou d'une autre, avec le coût d'une rénovation du logement au bout d'une dizaine d'années. Les rentabilités proposées aujourd'hui sont plus faibles qu'avant, mais si l'exploitant gère sérieusement, cela devrait être un gage de sécurité pour l'épargnant à long terme.
André Montialoux / Président de la Copro G
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